17

— Le flacon n’a pas pu tomber dans l’estomac du requin ! vocifère Wong. Tu l’as vu comme moi, le cylindre était bel et bien fermé !

Cela fait dix minutes que le Japonais tempête, les doigts crispés sur le volant. Peggy a dû faire un effort pour ne pas céder à l’abattement. Quand elle songe à tous les risques qu’elle a pris ce matin dans la réserve pour capturer le « tigre » ! Tout cela pour rien ! Elle en pleurerait de rage.

— C’est Brandon, murmure-t-elle enfin, il nous a tous bernés. Je pense qu’il se sentait suivi… Peut-être par tes amis. Il s’est rendu à la réserve pour jeter très ostensiblement le cylindre en pâture aux requins. Il savait bien que personne n’aurait le cran de plonger dans le bassin pour l’en retirer. Seulement c’était un leurre… Le container était vide. Le flacon est caché ailleurs, depuis le début. Tu le prenais pour un débile mais il nous a bel et bien roulés dans la farine. Nous sommes revenus à la case départ.

Wong ne dit rien. Il a les mâchoires serrées, l’air mauvais. Peggy le sent à bout, prêt aux pires extrémités. Il a pris le chemin de son domicile, la maison sur pilotis, le cheeckee séminole pour milliardaire branché, là où les attend Brandon. La jeune femme est inquiète, elle a peur que l’Asiatique ne s’en prenne violemment au jeune homme.

— Ça ne servira à rien de le frapper, dit-elle. Mieux vaut tenter de le faire parler en utilisant la ruse… en admettant qu’il dispose encore d’assez de mémoire pour se rappeler ce qu’il a fait du flacon.

— Tu ne comprends pas ! s’impatiente Wong. Nous n’avons plus le temps de faire dans la dentelle. Si nous ne livrons pas le produit cette nuit, nous serons morts à l’aube. Tous les deux. Tu as vu comment ils s’en sont pris aux infirmes du Club ? Rien ne les arrête.

Peggy avale sa salive avec peine. Elle pense à Burly Sawyer, découpé avec art, transformé en assiette de sushi, tronçonné en cinquante morceaux et pourtant si joli à regarder… Elle songe à ce que le tueur-cuisinier pourrait faire avec son corps, ses seins, son sexe. Elle l’imagine sculptant des fleurs de viande de la pointe du couteau… Elle lutte contre la nausée qui lui tord le ventre.

Quand ils arrivent chez Wong, elle est presque certaine qu’elle va découvrir la porte enfoncée, la moquette couverte de sang, et Brandon – ou plutôt ce qu’il restera de Brandon – artistement disposé sur la table basse du living, mais elle s’est alarmée pour rien. Tout est intact. Les ninjas de caoutchouc ne sont pas venus. Ils attendent. Le sursis n’a pas encore expiré.

Wong a revissé le cylindre d’acier. Il l’a tenu en évidence lorsqu’il est descendu de la voiture. Sans doute espérait-il duper ceux qui surveillent la maison ? Il gagne du temps… La nuit n’est pas encore tombée. Si l’on réussit à faire dire à Brandon où il a caché le flacon, tout peut rentrer dans l’ordre avant le coucher du soleil.

« C’est notre dernière chance, pense Peggy. Si nous sommes incapables de retrouver la drogue, ils viendront nous punir. »

Ils entrent. Brandon est assis sur la moquette, à l’autre bout du séjour, il affiche un air boudeur, contrarié.

— Me suis ennuyé… grogne-t-il en dévisageant Peggy.

Il y a quelque chose de « délabré » dans sa façon de parler, un émiettement des syllabes, comme s’il maîtrisait difficilement l’outil vocal. C’est moins la diction d’un petit garçon que celle d’un étranger luttant pour articuler une langue trop différente de la sienne.

Wong est parti prendre une douche. Il a branché la cafetière électrique. Peggy s’agenouille devant Brandon. Elle essaie de l’amadouer, mais il se dérobe. De toute manière, elle n’a jamais été très douée pour établir le contact avec les enfants. Malgré la peur et l’impatience qui s’insinuent en elle, elle ne peut se défendre d’une certaine tristesse au fur et à mesure qu’elle constate l’état de régression mental du jeune homme. « C’est peut-être passager, se répète-t-elle. Une fois qu’il aura évacué les dernières molécules de drogue charriées par son sang, il recouvrera probablement ses facultés. »

État confusionnel transitoire… elle connaît le terme. On l’emploie à propos des malades sujets aux crises d’épilepsie. Épisode ischémique… Elle rassemble ses souvenirs, elle se rappelle les mots qui coulaient de la bouche des médecins lorsqu’une de ses amies a été hospitalisée, il y a trois ans. Elle essaie d’ordonner le chaos, d’y planter des repères. Brandon se dérobe, il chantonne. Il a pris des objets, ici et là – coffret à cigarettes, briquet de salon – et s’en sert comme des jouets. Il mime un accident en le bruitant avec la bouche. Quel âge a-t-il dans sa tête ? Dix ans… encore moins ? Peggy songe à ces vieilles personnes victimes de la maladie d’Alzheimer qui, soudain, du fond de leur grand âge, se mettent à parler avec des voix de gamins, retrouvant tout à coup les intonations et le vocabulaire de leur enfance, comme si le temps se court-circuitait, revenait en arrière.

Elle ne peut s’empêcher de lever la main pour lui caresser la joue. Dieu sait s’il l’a exaspérée au cours des derniers mois avec son machisme d’éternel adolescent, mais aujourd’hui, en ce moment, il l’émeut. Elle le sent en train de glisser… Elle est au sommet d’une colline, et Brandon s’éloigne en dérapant le long de la pente. Elle lui tend la main mais il ne peut la saisir. Il glisse, il glisse, et la nuit qui tombe l’avale peu à peu. Il n’aura pas eu le temps de devenir vieux.

Il n’aime pas la caresse. Il s’en détourne avec exaspération. Il a manifestement atteint cet âge mental où les petits garçons fuient les démonstrations d’affection.

Wong redescend. Avant d’entrer dans la cuisine, il fait signe à Peggy de l’y rejoindre. Le parfum du Blue Mountain flotte dans l’air.

— Alors ? demande-t-il en versant le café noir dans les tasses.

Peggy hausse les épaules. Le Japonais ne fait aucun commentaire mais lève les yeux vers la grosse horloge d’acier fixée au mur. Les heures filent.

— Ils viendront à minuit, l’heure du rat comme on dit dans mon pays, fait-il sans regarder la jeune femme. Si je ne suis pas en mesure de leur donner le cylindre avec son flacon, nous connaîtrons une mort bien difficile. Tu as vu ce qu’ils ont fait à Burly Sawyer, là-bas, dans les Glades ? Je suis certain qu’il est resté vivant jusqu’au bout. Jusqu’à ce qu’on sépare sa tête de son cou. Ça représente beaucoup de souffrance. Les Chinois ont des termes très poétiques pour décrire ce type de torture.

— Tu ne te défendras pas ? riposte la jeune femme.

— On ne peut pas se défendre contre ces gens-là. Ce sont des fantômes, des ninjas. Ils entrent où ils veulent. Quand tu t’aperçois qu’ils sont là, il est déjà trop tard.

— Des ninjas…

— Oui, ça n’existe pas seulement dans les bandes dessinées, tu sais… Pendant des siècles, ils ont fait le sale travail à la place des samouraïs. Ils ont perfectionné des techniques de combat que les seigneurs, les bushi, considéraient comme immorales ou vulgaires. Ils se fichent pas mal de l’élégance ou du fair-play, leur unique souci est d’être efficaces. Et ils le sont. Horriblement.

Peggy vide sa tasse et lui tourne le dos. Elle le trouve sinistre, résigné.

— Si nous n’avions pas retrouvé le flacon d’ici minuit, je me tuerais, murmure Wong. Je ne veux pas tomber vivant entre leurs mains. Et s’il te reste un atome de bon sens, tu feras comme moi. Je t’aiderai à mourir si tu veux.

Elle ne répond pas. La gorge nouée, elle retourne dans le living auprès de Brandon. Il joue avec les cigarettes qu’il a alignées sur la moquette. Peggy abat une dernière carte.

— Le hold-up… dit-elle, c’est pour demain. Il y aura beaucoup d’argent à la banque. Beaucoup trop. Tu ne pourras pas tout emporter, ce sera trop lourd. Il faudra plusieurs sacs. Wong et moi avons décidé de t’accompagner. Il y aura des tas et des tas de billets. Nous sommes prêts, il faudra passer à l’attaque dès l’ouverture, avant que le fourgon blindé ne vienne relever les sacs. Tu comprends ?

Brandon a cessé de jouer avec les cigarettes. Il semble réfléchir.

« Il souhaitait tellement ce braquage, pense Peggy, il ne peut l’avoir oublié. Ce n’est pas possible. »

Elle répète son argumentation. Trop de liasses. Il faudra être trois… Une fortune, une véritable fortune. Plus d’argent qu’ils ne pourront en dépenser toute une vie.

Quelque chose scintille dans l’œil du jeune homme, une brève étincelle d’intelligence, comme si quelqu’un venait d’actionner un commutateur.

— Demain ? demande-t-il.

— Oui, chuchote Peggy. Il faut tout préparer pour les piqûres. Les combinaisons d’amiante sont dans la voiture. Mais je ne sais pas quelle dose il faut s’injecter, tu devras t’en charger. C’est compris ?

Brandon hoche la tête. Peggy se lève, comme si tout était dit.

— Okay, fait-elle, je te réveillerai demain à sept heures.

Le garçon fronce les sourcils, lève la main.

— Attends ! lance-t-il d’une voix à peu près normale. Tu n’as pas la dope…

— Ah ! Oui, c’est vrai, fait négligemment Peggy. Tu l’amèneras. Tâche de ne pas oublier.

Et elle lui envoie un baiser du bout des doigts, comme si elle montait se coucher.

— Attends ! trépigne Brandon. J’pourrai pas… Elle est pas ici… Faut retourner au bungalow.

— Au bungalow ?

— Ouais, elle est dans l’armoire à pharmacie… au milieu des autres bouteilles.

Peggy tressaille. Mon Dieu ! tant de détours alors que la drogue était sous son nez depuis le début… perdue dans le fouillis des flacons qui encombrent les étagères de la salle de bains.

— Ce n’est pas grave, fait-elle négligemment, je vais aller la chercher. À demain. Dors bien, il faudra être en forme.

Elle se déteste. Elle sait qu’elle est en train de leur sauver la vie mais il lui déplaît de déployer une telle duplicité.

Wong a tout entendu. Il a déjà ses clefs de voiture à la main.

— On y va, souffle-t-il. Bon sang ! Il s’est contenté d’appliquer le vieux truc d’Edgar Poe dans La Lettre volée… Mettre en évidence ce qu’on désire dissimuler.

— Je ne pense pas que Brandon ait jamais entendu prononcer le nom d’Edgar Poe murmure nerveusement Peggy. Il ne doit ce trait de génie à personne.

Trois minutes plus tard, ils roulent vers la plage. Le ciel devient rouge à l’horizon.

— On nous suit, annonce Wong après un bref coup d’œil au rétroviseur. Cette fois, ils ne se cachent même plus.

Peggy regarde par-dessus son épaule. Elle note la présence d’une voiture à 100 mètres en arrière. Ils sont désormais accompagnés… comme ce matin, dans le bassin, quand les requins les prenaient en filature à travers le brouillard de plancton.

Quand ils s’arrêtent devant le bungalow, Peggy voudrait courir mais ses genoux ne la portent plus. Elle tremble si fort qu’elle n’arrive pas à glisser la clef dans la serrure. Exaspéré, Wong lui arrache le trousseau des mains mais il se révèle aussi peu efficace que sa partenaire. Lorsque le battant accepte enfin de s’ouvrir, ils sont tous deux dans un tel état de nerfs qu’ils se flanqueraient des gifles si seulement ils en avaient le temps.

Dans un même mouvement ils se ruent vers la salle de bains. Peggy allume la lumière, ouvre l’armoire de toilette à la volée. Elle essaie de se rappeler la forme du flacon, mais celui-ci n’avait justement aucune particularité, sinon qu’il ne portait pas d’étiquette. C’était un flacon comme il y en a des dizaines sur les étagères qui s’alignent sous ses yeux. Lotions anti-moustiques, lotions contre l’érythème solaire, lotion…

— Il n’y est pas, constate Wong d’une voix presque criarde. Ils ont tous des étiquettes… Tous !

Une décharge électrique parcourt Peggy. Ma'Jameson… La vieille dame qui vient faire le ménage une fois par semaine… Elle a la manie de mettre de l’ordre dans les placards et de faire la chasse aux médicaments périmés. Normalement elle n’aurait pas dû venir avant lundi prochain.

Peggy sent l’affolement la gagner. Pendant que Wong s’obstine à examiner les flacons un à un, les débouchant pour les flairer, elle court au téléphone, cherche dans l’aide-mémoire le numéro de la vieille dame. On décroche au bout de trois sonneries.

— Vous êtes passée aujourd’hui ? interroge Peggy après s’être présentée. Ce n’est pourtant pas votre jour…

— Je sais, caquette Ma'Jameson, mais je ne pourrai pas venir la semaine prochaine, je dois aller chez une de mes nièces qui va accoucher, c’est pour ça que je suis passée ce matin, comme ça le ménage vous durera toute la semaine à venir si le señor Brandon veut bien faire un peu attention…

Elle se lance dans d’interminables commentaires sur la grossesse difficile de sa nièce, mais Peggy l’interrompt brutalement.

— Vous avez touché à l’armoire à pharmacie ? demande-t-elle. Vous avez jeté des flacons ?

— Bien sûr ! siffle la vieille piquée au vif. Des flacons sans étiquette, comme toujours. Vous gardez trop de flacons sans étiquette, c’est dangereux. Vous risquez de vous tromper et de vous empoisonner. Il ne faut jamais laisser les étiquettes écrites par le pharmacien se décoller. Je l’ai répété mille fois au señor Brandon.

Peggy est devenue blême, le sang déserte ses mains.

— Les bouteilles, balbutie-t-elle, qu’en avez-vous fait ?

— Je les ai vidées dans le lavabo et j’ai fait couler l’eau, grogne Ma'Jameson d’un ton outragé. C’est pour votre bien, ma petite ! Normalement je devrais me contenter de nettoyer votre porcherie, mais je vous aime bien, alors je prends soin de vous… Je sais que les jeunes n’ont aucune discipline et qu’il faut prendre les précautions à leur place, c’est comme mes petits-fils, ils…

— Les bouteilles vides, coupe Peggy. Où sont les bouteilles vides ?

— Rincées, elles aussi, répond la vieille femme qui commence à s’irriter de cet interrogatoire. En sortant de chez vous, je les ai jetées dans le collecteur de verre installé au carrefour, avec toutes vos bouteilles de Zinfandel vides qui s’entassaient sous l’évier de la cuisine. Je ne laisse jamais rien traîner, ce n’est pas mon genre. À quoi ça rime toutes ces questions ? Vous avez quelque chose à me reprocher ? Ce serait la première fois qu’on m’accuserait de trop bien faire le ménage !

Elle est agacée, prête à contre-attaquer. Peggy bredouille une excuse et raccroche. Wong se tient à côté d’elle, il a tout compris.

— Elle ne devait venir que lundi prochain, gémit Peg. Brandon en a profité pour cacher le flacon au milieu des autres. Il ne se doutait pas qu’elle ferait du zèle et passerait deux fois dans la même semaine… Elle a tout fichu dans les égouts, c’est sa marotte. Elle a l’obsession des médicaments périmés… Je crois qu’un de ses neveux s’est empoisonné de cette façon.

— Alors nous somme foutus, souffle Wong. Il n’y a plus rien à faire.

Baignade accompagnée
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